La Série Distribution d’Alerion par Catherine Robin et Johanna Guerrero – Agent commercial (épisode 1)
Alerion vous invite à suivre les actualités du droit de la distribution. Pour débuter cette série, focus sur le statut d’agent commercial. Inauguré dès 1958 en France, le statut a suivi l’harmonisation européenne en 1986 et continue d’évoluer sous l’influence de la Cour de justice.
Episode 1 – Pour bénéficier du statut d’agent commercial, nul besoin d’avoir le pouvoir de négocier les prix
Episode 2 – La faculté de déroger au droit à commission de l’agent
Episode 3 – Indemnité de rupture et faute grave de l’agent
Episode 4 – Agent commercial exerçant en dehors de l’UE et droit français
Episode 1
Pour bénéficier du statut d’agent commercial, nul besoin d’avoir le pouvoir de négocier les prix
En droit français et européen, l’agent commercial a droit à une indemnité à la fin de la relation avec le mandant (Code de commerce français, Art. L 134-12, Directive 86/653/CEE du 18/12/1986).
Jusqu’en 2020, et malgré les critiques, la Cour de cassation, suivie par la Cour d’appel de Paris, a toujours considéré que l’intermédiaire qui n’avait pas le pouvoir de modifier le prix et les conditions de vente avec les clients, ne pouvait pas être qualifié d’agent commercial. En conséquence, un tel intermédiaire ne pouvait obtenir ladite indemnité, sauf à apporter la preuve lourde et difficile de ses diligences auprès des clients, de ses négociations sur le prix et de son pouvoir de le modifier.
Le 4 juin 2020*, la Cour de justice de l’Union européenne a adopté une position diamétralement opposée et a jugé qu’une personne qui vend des marchandises au nom et pour le compte de son mandant n’a pas nécessairement besoin d’avoir le pouvoir de modifier les prix pour se voir reconnaître le statut juridique d’agent commercial.
La Cour de cassation* et la Cour d’appel de Paris* sont alors revenues sur leur jurisprudence et ont abandonné la condition du pouvoir de modifier les prix comme exigence pour un agent commercial.
La distribution via un réseau d’agents commerciaux est particulièrement adaptée à la distribution nationale et internationale de produits et de services. Pendant la durée du contrat, l’agent n’agit pas en son nom propre et ne développe pas sa propre clientèle mais celle du mandant, qui peut ainsi faire connaître ses marques et développer ses ventes sur un marché national ou étranger avec une structure légère (l’agent est rémunéré par une commission sur les ventes) par l’intermédiaire d’un opérateur connaissant bien le fonctionnement de ce marché.
A la fin du contrat, le mandant conserve la clientèle développée par l’agent, ce qui lui permet de s’implanter durablement sur le marché développé par celui-ci, par l’intermédiaire d’une filiale locale ou d’un distributeur local qui accepte le risque de distribuer les produits et services pour son propre compte. En revanche, l’agent perd le fruit de son travail. Cependant, le statut d’agent commercial prévu par la directive (86/653/CEE du 18/12/1986) incorporée dans le code de commerce français (art. L134-1 et suivants) lui permet d’obtenir une indemnité qui, selon la jurisprudence française, est le plus souvent égale à 2 années de commission, calculées sur les 3 dernières années du contrat. Ce montant n’est pas mentionné dans la loi : les circonstances peuvent justifier un montant inférieur.
Cette indemnité est limitée à l’activité d’agence commerciale et ne peut pas être étendue à d’autres intermédiaires ou prestataires de services.
En effet, l’agent commercial doit veiller aux intérêts du donneur d’ordres, agir loyalement et de bonne foi (directive, art. 3). En particulier, l’agent commercial doit « déployer les efforts appropriés pour négocier et, le cas échéant, conclure les opérations dont il a la charge ». Bien que ces opérations n’impliquent pas nécessairement la possibilité de modifier le prix des marchandises, elles nécessitent qu’il fournisse des informations et des conseils, qu’il entretienne une relation étroite avec les clients potentiels ou existants afin de favoriser les ventes. Seuls les efforts et les actions accomplis à ce titre permettent à l’agent de prétendre au statut et aux commissions sur les ventes s’il les déploie de manière permanente. Ainsi, un agent qui ne visite jamais les clients ou un prestataire de services qui n’est chargé que des opérations publicitaires sur un territoire, ne peut prétendre ni au statut d’agent commercial ni à une quelconque indemnité de cessation d’activité.
L’équipe d’Alerion en charge de la distribution et des contrats commerciaux, Catherine Robin et Johanna Guerrero, est à la disposition des entreprises françaises et étrangères pour les assister dans la rédaction et l’organisation de leurs relations commerciales.
* CJUE, 4 juin 4th, 2020, aff. C‑828/18, Trendsetteuse; Cass. com. 12 mai 2021, 19-17.042 ; CA Paris 20 mai 2021 19/05011