La rédaction des libellés de marques à l’heure des nouvelles technologies du Web 3.0
Corinne Thiérache
Si la première « blockchain » ou « chaîne de blocs » a été conceptualisée par Satoshi Nakamoto en 2008, les NFT, « non fungible token » ou « jetons non fongibles », eux, font fureur depuis 2017, grâce aux cryptokitties. Désormais, ces nouvelles technologies sont au cœur du Web 3.0 et les dépôts de marques en sont devenus l’un des principaux enjeux.
Les différents Offices et, notamment, l’Institut national de la propriété intellectuelle (INPI) et l’Office européen de la propriété intellectuelle (EUIPO), réceptionnent de plus en plus de demandes d’enregistrement de marques concernant ces nouvelles technologies et sont confrontés à des libellés bien souvent imprécis. Or l’article R.712-3-1 du Code de la propriété intellectuelle dispose que « Les produits et les services sont désignés avec suffisamment de clarté et de précision pour permettre à toute personne de déterminer, sur cette seule base, l’étendue de la protection. ». Force est de constater qu’il est difficile, pour l’ensemble des acteurs impliqués (déposants, avocats, CPI, juristes, etc.,), de rédiger des libellés suffisamment clairs, précis, et adéquats, recouvrant rigoureusement ces nouveaux produits et services.
A cet égard, le 23 juin 2022, l’EUIPO est venu apporter ses premiers éclaircissements (Produits virtuels, jetons non fongibles et métavers). L’EUIPO confirme que les produits virtuels relèvent de la classe 9. En revanche, le terme « produits virtuels » est imprécis et devra être refusé par les différents Offices. Ainsi, l’EUIPO énonce qu’il est nécessaire de préciser le contenu auquel les produits virtuels se rapportent « par exemple : produits virtuels téléchargeables, à savoir, vêtements virtuels ». Par ailleurs, l’EUIPO indique que la prochaine version de la classification de Nice intégrera, dans la classe 9, le libellé « fichiers numériques téléchargeables authentifiés par des jetons non fongibles », considérant l’utilisation des seuls termes « jetons non fongibles » inacceptable.
L’INPI, le 15 novembre 2022, s’est alignée sur les recommandations de l’EUIPO et a proposé différents exemples de libellés. Ainsi, à l’avenir, pourront être acceptés les « contenus numériques, à savoir fichiers numériques téléchargeables authentifiés par des jetons non fongibles [NFT] contenant des jouets et dessins graphiques à collectionner », de même que les « fichiers d’images téléchargeables contenant des œuvres d’art authentifiées par des jetons non fongibles [NFT] », en classe 9, mais également les « services d’authentification de biens immatériels au moyen de la technologie de la chaîne de blocs [blockchain] » en classe 42[1].
De manière générale, ces nouvelles technologies du Web 3.0 seront essentiellement intégrées aux classes 9, 35, 38, 41 et 42.
Désormais, il appartient aux praticiens de s’adapter aux demandes de leurs clients tout en fournissant leurs meilleurs efforts afin de concilier ces nouveaux dépôts de marques aux exigences des Offices.
[1] A. Drappier, C. Neveu, L.Zambito-Marsala, juristes Marques, K.Bounif, responsable de Pôle marques, au Département des marques, dessins et modèles de l’INPI, « La désignation des produits et services dans le cadre des dépôts de marques relatifs aux NFT, métavers et aux actifs numériques », PIBD 1 1912-II-1, 15 novembre 2022
Les avocats d’Alerion du Département IP/IT/Privacy peuvent assister leurs clients pour toutes les questions liées à la propriété intellectuelle et en particulier pour les stratégies à déterminer en vue des dépôts de marques en lien avec le Web 3.0.
Corinne Thiérache, Avocat Associée, et Océane Desplands, Master II Propriété intellectuelle et Technologies nouvelles (UGA)