Les ordonnances sociales COVID-19
Jean-Christophe Brun et Jacques Perotto
Le gouvernement n’a pas perdu de temps !
Immédiatement après la promulgation de la loi d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19 présentée dans notre dernière newsletter, le conseil des ministres a adopté le mercredi 25 mars pas moins de 25 ordonnances en matière civile, pénale et administrative.
Trois d’entre-elles ont été présentées par le ministère du travail : l’une portant mesures d’urgence en matière de congés payés, durée du travail et jours de repos, l’autre adaptant temporairement l’indemnisation des salariés en arrêt de travail ainsi que les modalités de versement des primes d’intéressement et de participation, la dernière portant mesures d’urgence en matière de revenu de remplacement.
Congés payés
Dans notre newsletter du 23 mars dernier nous vous indiquions que l’employeur ne pouvait pas imposer à un salarié de prendre ses congés payés pour faire face à la crise sanitaire ; seule une modification des congés déjà posés pouvant être imposée pour circonstances exceptionnelles.
Désormais l’employeur pourra imposer les dates de congés de ses salariés, à la condition toutefois de conclure préalablement un accord d’entreprise, ou de se trouver dans le champ d’application d’une convention collective de branche ayant négocié un accord le permettant.
Le département social se tient à votre entière disposition pour vous assister dans la rédaction d’un tel accord qui vous permettra :
– D’imposer ou modifier les dates de prise des congés payés de ses salariés dans la limite de six jours ouvrables, en respectant un délai de prévenance d’un jour franc ;
– D’imposer le fractionnement des congés payés sans être tenu de recueillir préalablement l’accord du salarié ;
– De suspendre temporairement le droit à un congé simultané des conjoints travaillant dans une même entreprise, si la présence de l’un d’eux s’avère indispensable.
Jours de repos
L’employeur pourra imposer ou modifier unilatéralement les dates des jours de réduction du temps de travail, des jours de repos prévus par les conventions de forfait ainsi que les jours de repos affectés sur le compte épargne temps des salariés, dans la limite de 10 jours et sous réserve de respecter un préavis d’un jour franc. La période de prise des jours de repos imposée ou modifiée ne peut s’étendre au-delà du 31 décembre 2020.
Durée du travail
Sur ce point, l’ordonnance n’apporte pas grand-chose puisqu’elle indique simplement que la liste des entreprises « de secteurs particulièrement nécessaires à la sécurité de la Nation » et nécessaires « à la continuité de la vie économique et sociale » qui seront autorisées à déroger aux règles d’ordre public et aux dispositions conventionnelles relatives à la durée du travail, au repos hebdomadaire et au repos dominical, sera précisée ultérieurement par Décret.
Pour autant, ces entreprises, jusqu’au 31 décembre 2020, seront autorisées à :
– porter la durée quotidienne maximale de travail à 12 heures ;
– porter la durée quotidienne maximale de travail à 12 heures pour les travailleurs de nuit, sous réserve de l’octroi d’un repos compensateur équivalent ;
– réduire la durée de repos quotidienne à 9 heures, sous réserve de l’attribution d’un repos compensateur égal à la durée de repos dont le salarié n’a pu bénéficier ;
– porter la durée hebdomadaire maximale de travail à 60 heures ;
– porter la durée hebdomadaire maximale moyenne sur une période de 12 semaines consécutives à 48 heurs (44 heures pour les travailleurs de nuit)
– déroger à la règle du repos dominical en attribuant un repos hebdomadaire par roulement.
L’employeur qui utilise l’une de ces dérogations devra, sans délai et par tout moyen, en informer le CSE et la Direccte.
Indemnisation des salariés arrêtés en raison de l’épidémie
L’ordonnance adaptant temporairement l’indemnisation des salariés en arrêt de travail en raison de l’épidémie n’est que la retranscription de dérogations déjà admises par différents décrets parus en février et mars 2020, concernant notamment la suppression du délai de carence et de la condition d’ancienneté d’un an pour bénéficier du complément de salaire versé par l’employeur.
Cette disposition initialement prévue jusqu’au 30 avril 2020 est prorogée jusqu’au 31 aouût 2020.
Intéressement et participation
La même ordonnance que celle relative à l’indemnisation des salariés arrêtés du fait de l’épidémie adapte les dates limites de versement des sommes dues au titre de l’intéressement et de la participation.
Ces sommes sont en principe versées avant le 1er jour du sixième mois suivant la clôture de l’exercice, soit, pour une entreprise dont l’exercice correspond à l’année civile, au plus tard le 31 mai.
Désormais, la date limite de versement aux bénéficiaires des sommes attribuées en 2020 au titre d’un régime d’intéressement ou de participation est reportée au 31 décembre 2020.
Assurance chômage
Cette ordonnance permet aux demandeurs d’emploi ayant épuisé leur droit au 12 mars 2020 de continuer à bénéficier des aides allouées par le Pole Emploi jusqu’à une date qui sera fixée par décret, et au plus tard, jusqu’au 31 juillet 2020.
Pour information, la réforme de l’assurance chômage qui devait entrer en vigueur le 1er avril 2020 est reportée au mois de septembre 2020.
Jean-Christophe Brun et Jacques Perotto, associés en droit social