La Grèce, un nouvel eldorado fiscal européen ?
Philippe Pescayre
Dans la liste des pays européens attractifs fiscalement, la Grèce n’est pas le premier à venir à l’esprit. En témoigne son barème d’imposition à l’impôt sur le revenu, aux taux élevés et à la progressivité rapide : 22 % pour la tranche de revenus entre 10.000 et 20.000 €, 28 % pour la tranche de revenus entre 20.001 et 30.000 €, 36 % pour la tranche de revenus entre 30.001 et 40.000 €, et 44 % pour les revenus supérieurs à 40.000 €, auquel s’ajoute une contribution fiscale de solidarité dont le taux est progressif et atteint 10% au-delà de 220.000 €.
Pour autant, la Grèce a décidé d’instaurer des mesures incitatives en faveur des personnes non domiciliées fiscalement sur son territoire et s’engageant à y résider, à l’instar du Portugal ou de l’Italie.
Ces dispositifs viennent renforcer l’arsenal grec qui connaissait déjà des mesures fiscales favorables. On peut citer par exemple des droits de succession relativement faibles (taux allant de 0 à 5 % pour les premiers 600.000 € pour les successions entre parents et enfants et petits-enfants, puis 10 % au-delà, contre un taux marginal de droits de succession de 45 % en France) et une absence d’impôt sur la fortune. Les revenus financiers sont également faiblement taxés : 5% pour les dividendes, 15% pour les intérêts et plus-values sur titres, à l’exception des plus-values boursières qui sont totalement exonérées si le cédant détient moins de 0,5% du capital de la société cotée. Ces revenus sont toutefois soumis également à la contribution fiscale de solidarité.
Ainsi, en l’espace d’un an, ce ne sont pas moins de trois régimes incitatifs en faveur des impatriés que le pays a instaurés.
Tour d’horizon sur les différents régimes mis en place récemment.
Le régime de faveur envers les bénéficiaires de pensions de retraite
Entré en vigueur le 31 juillet 2020, ce dispositif permet aux bénéficiaires d’une pension de retraite d’un pays autre que la Grèce d’être imposés, sur ladite pension et tous leurs autres revenus de source étrangère, à un taux forfaitaire de 7%, tout en étant exonérés de la contribution fiscale de solidarité et ce, pendant une durée totale de 15 ans. En revanche, les droits de donation et de succession relatifs aux biens détenus à l’étranger et les revenus de source grecque ne sont pas couverts par ce dispositif.
Pour être éligible à ce régime, il faut :
– Percevoir une pension de retraite de l’étranger ;
– Ne pas avoir été résident fiscal grec pendant au moins 5 ans sur les 6 années précédant le transfert du domicile fiscal en Grèce ;
– Transférer sa résidence fiscale en provenance d’un pays ayant conclu avec la Grèce une convention d’assistance administrative en matière fiscale.
Pour bénéficier de ce dispositif, la demande doit être adressée à l’administration grecque avant le 31 mars de l’année au titre de laquelle l’application du régime est sollicitée pour la première fois. L’impôt forfaitaire de 7% doit ensuite être payé chaque année, en un unique versement, au plus tard le dernier jour ouvrable de juillet.
Le régime en faveur des personnes disposant d’un patrimoine important
Si le dispositif précédent visait spécifiquement les titulaires de pensions de retraite (« high-net-worth pensioners »), celui présenté ci-dessous est destiné plus généralement à toute personne disposant d’un patrimoine important (« high-net-worth individuals »).
Ce régime permet, pendant une durée totale de 15 ans, de payer un impôt annuel forfaitaire de 100.000 € pour tous les revenus de source étrangère (les revenus de source grecque sont donc imposés séparément, selon les principes généraux de la loi grecque). De plus, il est possible sur option de l’étendre aux membres de sa famille, en s’acquittant d’une somme supplémentaire 20.000 € par an et par personne. Enfin, les personnes bénéficiant de ce régime sont également exonérées de droits de donation et succession sur leurs actifs situés à l’étranger.
Les conditions à remplir sont les suivantes :
– Ne pas avoir été résident fiscal grec pendant au moins 7 ans sur les 8 années précédant le transfert du domicile fiscal en Grèce ;
– Investir, dans un délai de 3 ans à compter de la demande faite pour bénéficier du dispositif, un minimum de 500.000 € en Grèce : immobilier, titres de sociétés grecques…
Pour bénéficier de ce régime, il est nécessaire d’en faire la demande auprès de l’administration fiscale grecque au plus tard le 31 mars de l’année au titre de laquelle on souhaite qu’il s’applique, et tout document nécessaire devra être fourni à l’administration dans un délai maximal de 60 jours à compter de la demande.
L’administration du pays d’origine du bénéficiaire sera informée de la demande de ce dernier par les autorités grecques.
Enfin, il est à noter que l’impôt forfaitaire (100.000 € + les éventuels suppléments de 20.000 €) doit être payé en un seul versement avant le dernier jour ouvrable de juillet. S’il n’est pas réglé au 31 décembre, la personne concernée perd son statut de résidente non-domiciliée en Grèce et sera imposée sur tous ses revenus selon les règles générales du droit fiscal grec.
Le régime de faveur des salariés et commerçants étrangers
Enfin, un troisième régime, qui est entré en vigueur le 1er janvier 2021 et ne vise que les nouvelles prises de fonctions, permet aux salariés et aux commerçants étrangers de bénéficier d’un allégement de 50% de l’impôt sur le revenu et de la contribution fiscale de solidarité.
Cet abattement ne concerne que les revenus salariés et commerciaux de source grecque. Par conséquent, les autres revenus de source grecque ainsi que les revenus de toute nature de source étrangère restent imposés selon les dispositions générales de la loi grecque.
Pour prétendre à ce nouveau régime, il faut :
– Ne pas avoir été résident fiscal grec pendant au moins 7 ans sur les 8 années précédant le transfert du domicile fiscal en Grèce ;
– Transférer sa résidence fiscale en provenance d’un pays de l’UE, de l’EEE ou d’un pays ayant conclu avec la Grèce une convention d’assistance administrative en matière fiscale ;
– Avoir un emploi salarié chez un employeur grec (une entité juridique grecque ou un établissement stable grec d’une société étrangère) ou exercer une activité commerciale en Grèce ;
– S’engager à résider en Grèce pour au moins 2 ans.
Ce régime s’applique pour une durée de 7 ans, sans prorogation possible.
Comment le cabinet ALERION peut vous aider ?
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• Préparer votre expatriation en analysant l’impact fiscal d’une telle décision sur vos revenus et votre patrimoine ;
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Après votre départ :
• Vous accompagner tout au long de votre expatriation eu égard à vos obligations déclaratives en France ;
• Préparer votre retour.
Philippe Pescayre, Associé, avec la contribution de Elie Kandemir, Elève-Avocat.