La Série Distribution d’Alerion par Catherine Robin et Johanna Guerrero – Agent commercial (épisode 2)
Alerion vous invite à suivre les actualités du droit de la distribution. Pour débuter cette série, focus sur le statut d’agent commercial. Inauguré dès 1958 en France, le statut a suivi l’harmonisation européenne en 1986 et continue d’évoluer sous l’influence de la Cour de justice.
Episode 1 – Pour bénéficier du statut d’agent commercial, nul besoin d’avoir le pouvoir de négocier les prix
Episode 2 – La faculté de déroger au droit à commission de l’agent
Episode 3 – Indemnité de rupture et faute grave de l’agent
Episode 4 – Agent commercial exerçant en dehors de l’UE et droit français
Episode 2
Agent commercial – La faculté de déroger au droit à commission
La Cour de justice de l’Union européenne reconnait la possibilité de déroger contractuellement au droit à commission de l’agent commercial pour les ventes conclues avec un tiers dont cet agent a obtenu antérieurement la clientèle pour des opérations du même genre. La portée de cette décision est majeure en ce qu’elle permet de limiter directement le droit à commission de l’agent et, indirectement, son droit à indemnité de fin de contrat qui est calculée sur les commissions versées.
Le statut de l’agent commercial est légal (C.com. art. L. 134-1 et s.) et harmonisé dans l’Union Européenne (directive 86/653/CEE du 18 décembre 1986). L’agent commercial est un intermédiaire indépendant qui négocie et/ou conclut des contrats de vente, d’achat, de location ou de prestation de services au nom et pour le compte de producteurs, industriels, commerçants ou autres agents commerciaux (C. com. art. L. 134-1). En contrepartie, l’agent a droit à une commission sur les opérations (comme les ventes) conclues grâce à son intervention ou sur celles conclues avec un tiers dont il a obtenu antérieurement la clientèle pour des opérations du même genre, (C. com. art. L. 134-6, Dir. Art. 7.1). Certaines des dispositions du statut légal sont impératives : il n’est pas possible d’y déroger. Cette décision rappelle que, malgré ces règles impératives, les parties bénéficient d’une certaine liberté contractuelle s’agissant des règles supplétives du statut.
Selon la Cour de Justice*, le droit de l’agent à recevoir une commission, comme le prévoit la directive, peut être aménagé contractuellement lorsqu’il s’applique aux opérations conclues avec un client, acquis initialement par l’intermédiaire de l’agent. La Cour a jugé que le contrat d’agent commercial peut prévoir que l’agent ne recevra aucune commission sur les ventes ultérieures.
Ainsi, les parties sont libres d’aménager les règles supplétives du statut d’agent commercial, comme le droit à commission sur les ventes ultérieures. Il est certain qu’un tel aménagement peut susciter de fortes réticences de la part des agents. Pour autant, la Cour relève que conférer un caractère impératif au droit à commission sur de telles opérations ne serait pas nécessairement plus protecteur des agents dans la mesure où « il ne saurait être exclu que, en pareille circonstance, certains commettants compenseraient le coût de la commission qui serait nécessairement due […] en réduisant le taux de la commission de base, en limitant ou en excluant les frais antérieurement remboursés ou d’autres éléments de la rémunération, voire renonceraient à nouer une relation contractuelle avec un agent commercial. » (§35)
Le statut protecteur de l’agent commercial est cependant fortement altéré par une telle faculté donnée au mandant.
En effet, en droit français, comme l’indemnité de fin de contrat due à l’agent est calculée sur le montant des commissions versées pendant les dernières années, priver l’agent des commissions sur les ventes ultérieures conduit mécaniquement à réduire le montant de cette indemnité.
- Pour préserver l’attractivité du statut d’agent commercial, à la fois pour l’agent qui a droit à une juste rémunération, et pour le mandant, qui peut développer sa clientèle sans engager de lourds investissements, le contrat d’agence commerciale doit donc être rédigé en veillant à préserver les intérêts des deux parties, pendant la relation et à la date de sa cessation.
L’équipe d’Alerion en charge de la distribution et des contrats commerciaux, Catherine Robin et Johanna Guerrero, est à votre disposition pour vous assister dans la rédaction des contrats d’agence commerciale et vous accompagner dans le cadre de tout précontentieux et contentieux en lien avec ce type de distribution.
*CJUE 13 octobre 2022, aff. 64/21, Rigall Arteria Management sp. Z o.o sp.k c/ Bank Handlowy w Warszawie S.A.